Je crois qu’on a tendance à confondre deux choses
complètement différentes, l’opposition de la culture légitime et de la culture
non légitime, et la hiérarchie interne liée à l’affinement propre de la
sensation. Dans tous les domaines culturels, hauts ou bas, on sait très bien
qu’à partir du moment où une pratique produit un affinement de la sensation, il
est des choses qu’on ne peut plus écouter ou voir. (...) Le niveau de
compétence esthétique au sein de toute appréciation d’une forme culturelle ou
artistique quelconque est indépendant du caractère haut ou bas sur une échelle
générale.
(...) Il existe des gens dont le raffinement dans des cultures dites populaires est infiniment supérieur à des gens qui vont écouter des concerts de musique classique ou qui vont à la biennale de Venise. On peut s’intéresser à toutes les formes, mais il faut absolument refuser l’idée qu’on le doive. Pourquoi s’obliger à lire ou voir des choses qu’on ne peut pas supporter ? Surtout, il faut séparer les hiérarchies esthétiques produites par l’expérience esthétique de toute classification des formes d’art en termes de haut et de bas.
Jacques Rancière, La méthode de l'égalité, 2012.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire